Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Six mois avant le coup d’envoi de la Coupe du Monde 1998, une scène insolite impliquant Fabien Barthez illustrait à merveille la personnalité hors norme du gardien des Bleus. C’est Jean-Marcel Ferret, ancien médecin de l’équipe de France, qui l’a racontée dans une interview accordée à L’Équipe…
Il n’y a pas que les joueurs dans une sélection de football, loin de là – et il y a par exemple le médecin. Dans les colonnes du journal L’Équipe, Jean-Marcel Ferret, qui occupait ce rôle pour les Bleus lors du triomphe de 1998, est revenu sur un épisode survenu en décembre 1997 à propos d’un certain Fabien Barthez. Le gardien, alors au sommet de sa gloire, avait été désigné pour un contrôle antidopage surprise à Tignes. Problème : au moment de l’appel, impossible de mettre la main sur lui.
Fabien Barthez introuvable pour son contrôle… ou presque
L’ancien médecin raconte alors avec précision cette scène presque irréelle, survenue pendant un stage d’entraînement hivernal. Alors que les membres du staff s’inquiètent de ne pas trouver Barthez, ils partent à sa recherche pendant plusieurs heures. Ce n’est que plus tard qu’ils découvrent où il se trouvait. Ferret se souvient :
Est-ce que j’ai vraiment soigné une fois Fabien Barthez ? Pas sûr… Quel personnage ! Le jour du match, il était extraordinaire de décontraction. « Je suis pas bien… j’ai la gigite… la peau des fesses qui s’agite ! », c’est lui avant les tirs au but en quarts de finale contre l’Italie en 1998 (0-0, 4-3 aux t.a.b., le 3 juillet). Mais c’était une fausse insouciance. La veille, quel stress. On avait l’impression qu’il jouait son match la veille, et qu’il était, en général, ailleurs par rapport au réel…
Comme à Tignes, le jour du contrôle antidopage de Noël 1997. Il avait été tiré au sort, mais on ne savait pas où il était. On l’a cherché des heures… il faisait de la plongée sous le lac gelé ! »
Fabien Barthez, connu pour son attitude nonchalante et son style peu conventionnel, semble avoir cultivé un rapport très personnel au stress de la compétition.
Loin de l’image du sportif rigide, il oscillait entre relâchement extrême et tension intérieure, parfois invisible à l’œil nu. Jean-Marcel Ferret souligne cette dualité, entre une façade détendue et une pression que Barthez évacuait à sa manière.
Le témoignage du médecin souligne également à quel point l’entourage du joueur était souvent dérouté par son comportement (et Bixente Lizarazu en sait quelque chose !). Pourtant, derrière cette imprévisibilité se cachait une force mentale impressionnante, capable de le faire briller lors des moments décisifs. La prestation de Fabien Barthez lors du quart de finale face à l’Italie, notamment durant la séance de tirs au but, en est une preuve éclatante.
Cette anecdote, racontée avec amusement mais aussi avec une certaine tendresse, rappelle que les champions ne sont pas toujours ceux qui semblent les plus sérieux ou les plus « carrés ». Fabien Barthez, six mois avant de soulever la Coupe du monde avec les Bleus, restait fidèle à lui-même : libre, insaisissable, et surtout profondément humain dans son approche du sport de haut niveau. Un homme et un joueur à part, tout simplement !