Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Figure emblématique du cinéma français et membre historique de la troupe du Splendid, Gérard Jugnot a connu toutes les époques de la comédie tricolore. Des années 1980 pleines d’audace aux productions plus cadrées d’aujourd’hui, l’acteur et réalisateur observe, à 74 ans, un virage évident dans la manière de faire rire.
Peut-on encore rire de tout en France en 2025 ? Pas selon Gérard Jugnot, et il n’est pas le seul à le penser. Invité de Télé-Loisirs il y a quelques temps, celui qui a marqué des générations entières avec Les Choristes ou Le Père Noël est une ordure s’est confié avec franchise sur l’évolution du climat humoristique en France, bien différent de celui qu’il a connu à ses débuts :
« Faire rire, ça a été toujours été nécessaire. Est-ce que c’est plus compliqué aujourd’hui ? C’est évident qu’il y a des choses qu’on ne peut plus faire, comme tout ce qui touche les religions. C’est embêtant, parce que j’ai toujours détesté les intégristes de tout poil. Ce qui fait rire les gens maintenant, c’est le quotidien, les rapports entre hommes et femmes, l’amour, le sexe. L’humour est moins politique désormais, il y a plus de coups à prendre. »
Un constat lucide, partagé par plusieurs de ses anciens complices. Christian Clavier, lui aussi membre du Splendid, avait récemment évoqué la même préoccupation au micro de BFM TV :
« La censure, l’autocensure, la politiquement correct sont en train de nous envahir. C’est compliqué pour la comédie, les bêtises. »
Ces prises de parole illustrent une inquiétude commune chez les acteurs et humoristes d’une génération qui a bâti son succès sur la liberté de ton. Pour Gérard Jugnot, cette évolution ne signe pas la fin de l’humour, mais marque un tournant où la prudence s’impose davantage qu’autrefois.
Malgré ce constat, l’acteur reste convaincu que le rire garde une fonction essentielle : celle d’un exutoire collectif, capable de désamorcer les tensions et de rapprocher les gens. Un message d’expérience, empreint de nostalgie, mais aussi d’espoir pour les comédies de demain.
