L’immense star française qui n’appréciait pas du tout Coluche en privé : « Il disait qu’il…

Coluche
INA (DR)

Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web

Humoriste culte des années 1970 et 1980, Coluche reste aujourd’hui encore une figure à part dans le paysage culturel français. Adulé pour son franc-parler et son engagement, il ne faisait pourtant pas l’unanimité parmi ses confrères. Et l’un d’eux, particulièrement prestigieux, ne cachait pas son aversion à son égard… de quoi éclairer sous un autre angle une rivalité longtemps tue.

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Figure majeure de l’humour scénique, Michel Colucci alias Coluche a laissé derrière lui une œuvre populaire, parfois abrasive, toujours authentique. Mort tragiquement en 1986, le comédien a marqué des générations, tant par ses sketchs emblématiques que par la création des Restos du cœur. Pourtant, malgré son aura immense, Coluche ne séduisait pas tout le monde.

Raymond Devos, maître absolu du langage et autre géant de la scène, se plaçait alors aux antipodes de cet humour plus cru et plus frontal. Deux mondes difficiles à réconcilier, au point que l’homme aux jeux de mots soigneusement ciselés n’hésitait pas à dire ce qu’il pensait. C’est ce qu’expliquait l’un des proches de Devos, Alain Slim, dans un entretien accordé en 2016 au média belge Ma Télé, à l’occasion des dix ans de la disparition du virtuose des mots :

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« Devos c’était un clown qui avait beaucoup de cœur, beaucoup d’âme, pas un « gag man » qui fait des gags gratuits. Quand on fait rire et que ça sort du cœur, c’est toujours bon. Si ça sort de plus bas, il disait que c’était moins bon. Il n’aimait pas du tout Coluche, il disait qu’il faisait de l’humour un peu facile, en-dessous de la ceinture. »

Bien au-delà de cette critique, le talent de Raymond Devos demeure incontestable. Son intelligence scénique, son rythme, son maniement unique de la langue française continuent d’impressionner, d’autant plus qu’il était autodidacte, ayant quitté l’école très jeune. Son perfectionnisme était tel qu’il pouvait retravailler un sketch jusqu’à l’obsession, comme le rappelait un membre de sa fondation :

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« Il était capable de récrire des pages et des pages. Pour le sketch du penseur par exemple, on a un manuscrit de 700 pages. 700 pages de ratures, de réécritures et de recommencements. »

Mais dresser un portrait opposant Devos le besogneux à Coluche le spontané serait réducteur. L’acteur de « Tchao Pantin », malgré son image d’humoriste brut, travaillait énormément lui aussi. Il trouvait l’inspiration dans les conversations glanées au quotidien, et enregistrait régulièrement ses échanges avec des amis pour en extraire, plus tard, les pépites comiques capables de faire mouche sur scène.

Dans leurs univers respectifs, Raymond Devos et Coluche ont façonné deux visions radicalement différentes du rire, chacune devenue mythique à sa manière. Et plutôt que de ressasser leurs incompatibilités, il demeure précieux de savourer les traces qu’ils ont laissées. Deux monuments, deux regards sur le monde, deux héritages que les années ne ternissent décidément pas.

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