Par Mathieu Seguin | Rédacteur sport
L’idée qu’un joueur puisse changer à lui seul la trajectoire d’une organisation NBA a toujours fasciné les fans. Pourtant, lorsqu’il s’agit de Kevin Durant et de son passage chez les Warriors, les opinions se divisent encore. Certains continuent d’affirmer que son arrivée a « sauvé » la dynastie de Stephen Curry, tandis que d’autres estiment au contraire que Golden State n’avait besoin de personne pour écrire son histoire.
Depuis plusieurs semaines, le paysage NBA s’enflamme à nouveau entre une course au MVP exceptionnelle et des équipes qui déjouent les pronostics. Pourtant, c’est un sujet vieux de presque deux ans qui a ressurgi dans l’émission Road Trippin’. L’ancien champion Richard Jefferson y a réagi à l’idée lancée autrefois par Isiah Thomas, selon laquelle Kevin Durant aurait « sauvé » la trajectoire des Warriors en rejoignant l’équipe après la défaite de 2016 contre Cleveland.
La discussion aurait pu rester anecdotique, mais Kendrick Perkins a rallumé la mèche en soutenant pleinement l’analyse d’Isiah Thomas. Richard Jefferson a immédiatement repoussé cette version des faits, rappelant que Golden State n’avait jamais dépendu d’un seul joueur pour écrire son parcours. Il a insisté sur la valeur du titre 2022, marqué par une résilience retrouvée. « Le titre le plus important de la carrière de Steph est celui gagné après le départ de Durant. Ils ont gagné avant lui et après lui. »
Un rappel utile au cœur d’un débat éternel
Jefferson n’a jamais cherché à minimiser l’apport colossal de Kevin Durant, mais il refuse que l’on réécrive l’histoire au point d’effacer l’identité collective de Golden State. Durant a permis à l’organisation d’atteindre un niveau historique, certes, mais les fondations existaient bien avant. Ce point est essentiel pour comprendre le fonctionnement d’une dynastie moderne : une superstar peut renforcer une structure, mais rarement en être l’unique raison d’être.
En réalité, l’argument selon lequel Durant aurait sauvé l’héritage des Warriors repose surtout sur une frustration née après la remontée de Cleveland en 2016. Beaucoup ont vu dans sa signature l’arrivée d’un joueur déjà MVP dans une équipe de 73 victoires. Pourtant, l’hypothèse selon laquelle Golden State n’aurait plus pu gagner relève davantage de la projection que de l’analyse. La suite a d’ailleurs prouvé le contraire : malgré l’âge, malgré les blessures, la structure est restée compétitive et a retrouvé le sommet en 2022, confirmant ce que Jefferson défend avec conviction.
Cette discussion met surtout en lumière la manière dont certains récits NBA deviennent des certitudes alors qu’ils ne reposent que sur des impressions. L’idée d’une dynastie sauvée par Durant occulte le rôle central de Curry, Thompson et Green dans la création d’une identité qui a marqué une génération entière. Elle minimise aussi la capacité d’une organisation à évoluer, à s’adapter, à rebondir après un échec.
Road Trippin’ aurait pu se concentrer sur l’actualité brûlante de la ligue, mais ce retour sur un vieux débat rappelle au moins une chose : les Warriors des années 2010 demeurent l’une des équipes les plus marquantes du siècle, avec ou sans Kevin Durant.
