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Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Connue pour son franc-parler autant que pour sa longévité à la télévision, Karine Le Marchand n’a jamais hésité à utiliser sa notoriété pour faire passer des messages forts. À l’occasion d’un cap symbolique de sa vie, l’animatrice s’était penchée sur la place des femmes dans la société française. Un constat lucide, largement salué. Et toujours d’actualité.
Figure majeure du paysage audiovisuel français, Karine Le Marchand a fête ses 55 ans il y a deux ans. Animatrice emblématique de L’amour est dans le pré, qu’elle incarnait déjà depuis de nombreuses saisons, la native de Nancy savait que ce passage marquant pouvait devenir autre chose qu’un simple anniversaire. Elle en a fait un moment de réflexion collective, en s’adressant directement aux femmes de sa génération et au-delà.
Très suivie sur les réseaux sociaux, Karine Le Marchand accompagnait alors une vidéo personnelle d’un long texte engagé. Un message pensé comme un manifeste, mêlant expérience intime, regard sociétal et volonté de bousculer certains tabous persistants autour de l’âge, du corps et de la liberté féminine. Une prise de parole qui intervenait dans un contexte où les femmes de plus de 50 ans restent encore peu valorisées dans l’espace public.
Au cœur de son propos, une donnée frappante, souvent ignorée ou minimisée. Pour l’animatrice, la réalité démographique contraste fortement avec la représentation médiatique dominante, encore largement tournée vers la jeunesse. Une dissonance qu’elle a choisi de dénoncer frontalement. Sur ses réseaux sociaux, Karine Le Marchand écrivait alors :
« Une française sur 2 a plus de 50 ans, et pourtant on dirait que vieillir est encore un gros mot pour les femmes… Qui nous représente dignement ? Qui nous dit qu’on est belle, sans le “encore” qui va avec ?
Qui nous dit de profiter de notre liberté, alors que nos enfants s’envolent, plutôt que de nous parler du manque cruel du nid vide ? Qui nous dit que des vacances sans tampon ni serviette c’est le pied ? Qui nous dit que l’expérience nous permet de reconnaître rapidement ce et ceux qui ne nous correspondent pas ? Qui nous dit qu’on a le pouvoir de changer le monde à tout âge si on se donne l’énergie de s’en emparer ?
Qui nous dit que les projets ne s’arrêtent pas si on le décide ? Qui nous dit que notre capital vieillesse se décide maintenant, et que le sucre, le stress, l’alcool, la clope et la sédentarité vont nous faire vieillir mal et prématurément ? Qui nous dit que vivre seule n’est pas une fatalité, mais l’occasion de mieux se connaître, de se réparer, et d’explorer le monde qui nous intéresse, sans rendre de compte à quelqu’un qui ne nous mérite pas ? Qui nous dit que la sororité est sans limite, et que la jalousie “typiquement féminine” est une invention masculine pour nous opposer, et nous empêcher de nous rassembler en force ? Mes sœurs, je vous le dis : vieillir est un cadeau, vivre est un art. Let’s go la vie ! On ne lâche rien !! »
Un texte dense, sans concession, qui a trouvé un large écho auprès de nombreuses internautes. Beaucoup s’y sont reconnues, saluant une parole rare dans un univers médiatique encore frileux sur ces questions. Karine Le Marchand y revendiquait une vision positive de l’âge, loin des discours anxiogènes souvent associés au vieillissement féminin.
Ce message faisait également écho à d’autres voix connues du grand public. Figure populaire du cinéma et de la télévision, Michèle Bernier s’était elle aussi exprimée sur la disparition progressive des femmes mûres des écrans, notamment au cinéma, lors d’une intervention remarquée. Sur le plateau de TV Mag Le Figaro, elle avait indiqué :
« J’ai la chance d’en faire moins les frais que d’autres. Mais il y a un problème avec les actrices plus âgées car le cinéma est un art qui a besoin de ‘chair fraîche’. Heureusement que la télévision nous offre des possibilités plus grandes et fait appel à beaucoup de femmes comme dans ’’Marleau’’, ’’HPI’’ ou ’’La stagiaire’’. Pour des actrices très belles et séduisantes qui vieillissent, c’est difficile. »
Deux prises de parole différentes, mais un même constat partagé. À 57 ans, Karine Le Marchand assumait pleinement son rôle de porte-voix, refusant que l’âge devienne un facteur d’effacement. Son message, empreint de sororité et de lucidité, continue de résonner comme un rappel salutaire : la réalité des femmes françaises mérite enfin d’être regardée en face.
