Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
Figure incontournable de l’humour en France depuis plus de trente ans, Gad Elmaleh entretient pourtant un rapport singulier avec l’Hexagone. Souvent perçu comme un humoriste français à part entière, le natif de Casablanca a tenu à remettre les pendules à l’heure à plusieurs reprises. Une mise au point nette, parfois teintée d’agacement, sur son identité et son parcours. Et sur une confusion qui persiste encore aujourd’hui.
Humoriste parmi les plus populaires de sa génération, Gad Elmaleh a bâti l’essentiel de sa carrière en France, pays où il s’est imposé comme une valeur sûre du stand-up et du cinéma. Pourtant, contrairement à beaucoup de ses confrères issus de l’immigration, l’artiste n’y est ni né ni grandi. Arrivé sur le territoire français à l’âge de 21 ans seulement, après une enfance au Maroc et des études au Canada, il n’a jamais cessé de rappeler cette réalité, souvent ignorée du grand public.
Ce décalage entre perception et réalité s’est notamment illustré lors de son passage dans l’émission C A Vous, en septembre dernier, alors qu’il était interrogé sur le séisme meurtrier ayant frappé le Maroc. Questionné par Natacha Polony sur un supposé tiraillement identitaire, l’humoriste avait répondu sans détour au sujet de sa nationalité :
« Je ne suis pas franco-marocain… Je suis immigré en France mais je suis Marocain. Et j’aime profondément la France comme beaucoup d’immigrés aiment la France et la respectent. »
Une précision qui revient régulièrement dans la bouche de l’acteur, notamment lorsqu’il est interrogé sur son absence de nationalité française. Dans un entretien accordé au Journal du Dimanche, le comédien avait expliqué les raisons administratives et personnelles de ce choix, en revenant sur son arrivée dans l’Hexagone :
« C’est vrai, j’ai mon passeport canadien, marocain, mais pas français. Quand je suis arrivé en France, j’avais fait la queue pendant des heures devant la Préfecture pour obtenir ma carte de séjour et avoir le droit de travailler. Des années plus tard j’ai fait les démarches, mais c’était vraiment trop compliqué, long et fastidieux, je me suis un peu découragé. Depuis, je n’ai pas renouvelé. »
Pour autant, pas question pour Gad Elmaleh de renier ce que la France lui a apporté, bien au contraire. Toujours dans cet échange, l’humoriste avait tenu à souligner son attachement profond au pays qui a révélé son talent :
« Mais j’aime la France, je lui dois beaucoup. J’y habite et y paye mes impôts. Ma seule frustration est de ne pas pouvoir voter. »
Un discours cohérent qu’il a confirmé à plusieurs reprises par la suite, notamment lors d’entretiens accordés à Yahoo puis au Parisien, où Gad Elmaleh livrait une réflexion plus personnelle sur son rapport à l’Hexagone :
« C’est intéressant parce que moi, je pourrais passer pour un mec qui est né en France. Mais j’ai une attitude. Pour moi, la France, c’est mon révélateur. Sans elle, j’aurais été comme un danseur sans musique. J’ai été porté, accueilli, c’est pour ça que j’ai une vision très old school de l’immigré qui doit aussi respecter et remercier le pays dans lequel il est. »
Entre reconnaissance sincère et affirmation identitaire, Gad Elmaleh assume pleinement sa position. Reconnaissant envers la France sans jamais renier ses origines, l’humoriste a trouvé un équilibre qui lui ressemble. Une chose est sûre : s’il aime profondément l’Hexagone, il reste avant tout, et sans ambiguïté, marocain.
