Par Joël Pütz | Journaliste sportif
Se faire respecter dans le vestiaire n’est pas toujours facile, encore moins quand on est un jeune joueur. Champion NBA aux côtés de LeBron James, Shane Battier en avait fait la brutale expérience lors de ses débuts dans la ligue, à Memphis.
Il fut l’un des role players les plus respectés de son époque, avec 977 matchs de saison régulière et deux titres acquis vers la fin de sa carrière au Heat. Réputé pour son excellente défense, Shane Battier a été un joueur précieux partout où il est allé, que ce soit à Miami avec LeBron James, à Houston aux côtés de Tracy McGrady et Yao Ming ou encore aux Grizzlies, où il avait lancé sa carrière pendant la saison 2001-02.
Cela dit et malgré plus de 14 points de moyenne pendant son année rookie, il lui avait fallu un peu de temps pour s’imposer dans le Tennessee, d’autant plus qu’il avait débarqué dans une équipe au niveau de jeu calamiteux et dont la saison avait été compliqué (23-59). Battier avait d’ailleurs été brutalement recadré par ses vétérans durant une réunion de crise de l’équipe, comme il l’a récemment raconté à Pablo Torre :
Quand Shane Battier était envoyé au coin par les vétérans des Grizzlies
Une réunion réservée aux joueurs n’a lieu que lorsque les médias vous critiquent, que les supporters s’en prennent à vous. Bon, vous ne jouez pas bien. Bon, tous les films disent aux capitaines, aux vétérans, de convoquer une réunion réservée aux joueurs. On va exprimer nos doléances et se faire un petit moment de joie, et ça va nous propulser vers de meilleures performances.
Me voilà, plein de droiture, venant de Duke, à la manière de Coach K. Je suis le premier à me lever et à dire : « Je dois être honnête, le leadership des vétérans de cette équipe est nul. » Très honnête, très direct. Et ils m’ont dit : « Hé le gamin Duke, ferme ta gueule. Va t’asseoir dans ton coin. T’es qui ? » Et je me suis dit : « Oh là là. » Je n’ai pas su lire l’ambiance.
Ça m’a rendu humble, et j’ai réalisé : « Bon sang, je ne peux pas venir ici en force, parce qu’il y a une sorte d’éthique, un credo, un chemin tacite à suivre dans les vestiaires pour gagner en crédibilité. » Et je n’avais pas fait ça jusque-là. Alors j’ai fermé ma gu*le, je me suis mis au travail. Mais je ne suis pas devenu cynique, je ne suis pas devenu blasé. Je n’ai pas laissé ce vestiaire me changer.
Alors j’ai continué à travailler. Et une chose étrange s’est produite : les gars qui hésitaient peut-être et ne savaient pas comment agir et gagner ont commencé à adopter des attitudes et des comportements gagnants. Et tout d’un coup, on a senti le vestiaire changer un peu. Et on a commencé à y croire un peu.
La patience avait effectivement porté ses fruits puisque quelques années plus tard, entre 2004 et 2006, Memphis enchaînait trois qualifications consécutives en playoffs.