Par Elsa Girard-Basset | Journaliste web
L’avenir du tennis se joue peut-être autant en coulisses que sur les courts. Entre tradition et modernité, certains choix techniques suscitent des débats passionnés. Jo-Wilfried Tsonga, figure emblématique du tennis français, a récemment pris la parole pour exprimer un désaccord de fond avec une idée avancée par Novak Djokovic. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne mâche pas ses mots.
C’est dans le cadre d’une interview accordée à Prime Video que Jo-Wilfried Tsonga, aujourd’hui retraité des courts mais toujours impliqué dans le monde du tennis, a réagi à une prise de position de Novak Djokovic. Le Serbe, connu pour ses avis tranchés, avait déclaré qu’il préférait la technologie à la présence humaine des juges de ligne, estimant que cela permettait plus de précision et de rapidité. Une vision futuriste du jeu qui ne passe pas du tout auprès de l’ancien numéro un français.
« Je ne suis pas tout à fait d’accord avec Novak Djokovic. Cela fait partie de notre patrimoine que d’avoir des juges de lignes comme ça fait partie de notre patrimoine d’avoir des arbitres ou des ramasseurs de balle. Je pars du principe que si demain on enlève les juges de ligne, on devrait aussi enlever les arbitres et peut‐être nous mette un écran avec quelqu’un qui intervient par vidéo pour faire l’arbitre. Il y a une déshumanisation. On pourrait aussi mettre des robots avec des puces dans les balles et évidemment remplacer les spectateurs avec de la réalité augmenté. »
Cette déclaration percutante illustre bien la crainte de Tsonga face à une tendance qu’il juge déshumanisante. Pour lui, le tennis n’est pas qu’un sport de précision ou de performance, c’est aussi un théâtre d’émotions, de regards, d’erreurs parfois, mais surtout de présence humaine. La disparition progressive des juges de ligne au profit de l’arbitrage électronique, comme c’est déjà le cas sur certains tournois, sonne pour lui comme une perte de repères, presque une trahison du patrimoine du jeu.
Les propos de Novak Djokovic n’ont pas convaincu Jo-Wilfried Tsonga
Face à cela, Novak Djokovic, toujours à la recherche d’innovation et de performance maximale, avait affirmé :
« Si je dois choisir entre les juges de ligne ou la technologie, je suis plutôt partisan de la technologie. Je dirais que c’est plus précis et ça fait gagner du temps . »
Une phrase simple, mais qui cristallise une opposition claire entre deux générations de joueurs. Là où Djokovic prône l’efficacité, Tsonga défend l’âme du jeu, celle qui repose sur des figures humaines parfois imparfaites, mais essentielles à l’identité du sport.
Il faut dire que cette discussion intervient dans un contexte plus large de transformation du tennis professionnel. Les innovations technologiques se multiplient : arbitrage automatisé, statistiques en temps réel, outils de coaching par IA… Mais jusqu’où faut-il aller ? Pour Jo-Wilfried Tsonga, le seuil est franchi lorsqu’on remplace des personnes par des machines. Et sa sortie, bien qu’émotive, pose une vraie question de société sportive : quelle place voulons-nous laisser à l’humain dans le sport de demain ?
Au final, ce désaccord entre deux légendes contemporaines du tennis en dit long sur les fractures à venir dans le monde sportif. Entre tradition et modernité, émotion et performance, humanité et technologie, le débat ne fait que commencer. Et à voir la passion avec laquelle Jo-Wilfried Tsonga défend ses positions, on peut s’attendre à ce que le sujet continue d’agiter les esprits — sur les courts comme en dehors.