Interview Valériane Ayayi : « J’ai passé une superbe année avec des filles superbes »

L’internationale française, qui présente 68 sélections avec l’équipe de France, a remporté la semaine dernière son troisième titre de championne de France en trois saisons, cette fois-ci avec le Tango Bourges. L’occasion pour Parlons Basket Féminin de revenir avec elle sur cette magnifique saison, ponctuée d’un quart de finale d’Euroligue, mais aussi d’évoquer les échéances à venir, son été avorté aux Las Vegas Aces mais aussi son avenir en club.

PARLONS DE TA SAISON À BOURGES

Parlons Basket Féminin : Tu quittes Villeneuve l’été dernier pour rejoindre Bourges. Qu’est-ce qui t’as motivé à faire ce choix ?

Valériane Ayayi : Je n’avais pas passé la meilleure des années malgré le titre remporté, donc la question était ensuite de savoir si je devais partir à l’étranger ou rester en France. Le coach qui m’a lancé en professionnel m’a alors contacté [Olivier Lafargue, ndlr], j’avais l’opportunité de pouvoir retrouver des amis à moi que j’avais auparavant côtoyé à Montpellier ou en Équipe de France. Le choix a donc été rapidement fait, après une année difficile, de rester en France, là où on est dans un certain cocon en tant que française, et de continuer à jouer pour des titres.

PBF : Justement, comment se sont passées les discussions avec Olivier Lafargue, t’a-t-il appelé, est-ce que votre relation a beaucoup influencé cette décision ?

VA : Oui ! Je sais comment travaille Olivier, il sait comment je travaille, on se connait bien ! Je l’ai connu avant même de partir à l’INSEP, donc c’est une relation de longue date. Il était important pour moi de pouvoir à nouveau coopérer avec un coach qui savait travailler avec moi et qui me connaissait assez pour me driver et me faire passer quelques échelons.

PBF : Plongeons désormais dans ta saison, puisqu’après quelques matchs avec tes nouvelles coéquipières et un trophée remporté, vous vous inclinez sur le parquet de Tarbes. Est-ce que des doutes ont commencé à s’installer à ce moment-là, même si ce n’était que le début de la saison ?

VA : Non, on ne peut pas douter à ce moment-là, sinon ce serait compliqué ! C’était l’un de nos premiers matchs, on savait qu’on allait en perdre quelques uns. Maintenant, je pense que ce match a aussi lancé notre saison, parce que derrière, on répond plutôt positivement après cette défaite. On savait qu’on allait perdre des matchs, qu’on était pas invincibles ou quoique ce soit. Personne dans la ligue ne l’est, encore plus maintenant avec l’homogénéïté qui s’y trouve ! C’est arrivé à ce moment-là, on a su se remettre en question, se remettre au travail encore plus durement et je pense qu’au final, on a bien répondu.

PBF : Avec les blessures qui sont intervenues en cours de saison, avec notamment Cristina Ouviña, Katherine Plouffe et Sarah Michel, est-ce que cela n’a pas été difficile de tenir physiquement avec un effectif un peu plus réduit ?

VA : C’était dur. C’était dur. Après, malgré ces blessures là, on avait quand même un roster assez conséquent. Il a fallu donner un petit peu plus à chaque match. C’était aussi une période difficile parce qu’il fallait absolument gagner en Euroligue pour aller le plus loin possible, mais ça contribue aussi à la beauté de notre saison, puisque malgré les absences, on a réussi à rester soudées et à donner une âme à cette équipe pour aller chercher les victoires.

PBF : Deux jokers médicaux sont donc arrivés, dont l’une de vos rivales espagnoles [Laia Palau, ndlr]. Comment s’est passé l’intégration, cela n’a pas été trop compliqué ?

VA : Non, pas du tout ! Ça a été super, parce qu’on avait besoin d’elle, et elle avait besoin de retrouver une équipe dans laquelle elle pouvait prendre du plaisir. Elle parle aussi français, ce qui est un vrai plus, elle a déjà été au club, donc non, ça a été une superbe rencontre. C’est devenu une amie.

PBF : Tu l’as évoqué, vous êtes allé jusqu’en quarts de finale d’Euroligue. Était-ce un objectif en début de saison, espériez-vous peut-être aller plus loin ?

VA : C’était un objectif de début de saison. On en avait parlé, le président nous en avait fait part, il fallait faire un quart de finale d’Euroligue. Viser plus haut, c’est difficile quand on voit les budgets des clubs qui sont dans le Final Four. Après, il y eu Sopron qui a été la belle surprise, donc on était contentes de voir qu’il n’y avait pas que des « gros, gros calibres » avec Kursk, Yakin et Ekat, même si Sopron reste quand même quelque chose de lourd. Mais de notre côté, l’objectif était de faire un quart de finale, et on l’a rempli.

PBF : En championnat, vous finissez à la première place du classement. Est-ce que vous redoutiez un adversaire en particulier à l’approche des Playoffs ?

VA : Non, on redoute tout le monde, pas tellement une en particulier. On sait que tout le monde a battu tout le monde pendant la saison, on sait que l’on finit première, mais que derrière des équipes se battent pour les places 4, 5 et 6 jusqu’à la dernière journée. On sait très bien que le championnat est tellement dense que l’on peut perdre contre tout le monde à chaque moment. On s’est donc concentrées sur nous, parce que beaucoup de choses dépendaient aussi de notre manière de jouer, et ça s’est révélé plutôt positif. 

De gauche à droite : Kristen Sharp, Valériane Ayayi, Sarah Michel, Marine Johannes et Océane Monpierre (Crédit photo : Chloé Berard)

PBF : Effectivement, vous effectuez un parcours sans faute jusqu’à la finale où vous retrouvez Tarbes, avec deux premiers matchs à sens unique. Y’avait-il un état d’esprit particulier pour aborder ces finales de la manière dont vous l’avez faite ?

VA : Non, on savait ce qu’on voulait. Comme l’a dit le coach, on a été formaté dès le début de saison pour penser à ce titre. On savait donc où on allait, quelle direction on prenait. Après, le chemin qu’on allait prendre, c’était à nous de le tracer. Forcément, on était chez nous donc on était prêtes. On a bien travaillé durant les dix jours qui ont séparé les demis et la finale, on s’est bien reposées, on a bien soigné les petits bobos, donc on était prêtes, c’est tout.

PBF : Lors du match 3, vous vous inclinez en prolongations. Qu’est-ce qui a pu vous manquer dans cette rencontre ?

VA : Il faut se dire qu’après les deux premiers matchs, Tarbes a quand même travaillé ! Ils ont changé des choses, on a gardé de notre côté les choses qui avaient fonctionnées sur les deux premières rencontres, et ça a moins bien fonctionné, voire pas fonctionné lors du troisième match, donc forcément on s’incline. Maintenant, on savait qu’il n’y avait pas tout à jeter, que forcément elles avaient travaillé, regardé les vidéos, comment on défendait, comment on attaquait, donc elles nous ont posé plus de problèmes. Voilà, c’est comme ça.

PBF : D’un point de vue personnel, tu as connu un match difficile dans ton pourcentage au tir. Comment l’as-tu vécu, est-ce que ça a pu amener des doutes pour le match suivant ?

VA : Non, ça ne m’a pas fait douter. On a regardé les vidéos, il y avait aussi un contexte particulier, je ne contrôle pas tout ce qui se passe sur le terrain. On n’a pas été aidées, on a eu des retours qui nous ont fait comprendre que certaines instances n’avaient pas été satisfaites de la façon dont le match avait été pris en compte. Maintenant, ça n’enlève en rien la performance de Tarbes.

PBF : À l’occasion du match 4, toujours à Tarbes, vous prenez assez rapidement une avance dans la rencontre, mais Tarbes parvient à revenir à plusieurs reprises grâce à des runs en seconde période. Comment avez-vous vécu cette deuxième mi-temps ?

VA : On l’a gérée comme on a géré tous les autres matchs. On a laissé passer l’orage quand elles ont eu des runs, les rencontres à Tarbes ont de toute façon été des matchs de séries. On a quand même réussi à maintenir un certain écart qui nous a permis de gagner !

PBF : À la clé de cette victoire, un 14e titre dans l’histoire du club [un record dans le championnat de France, ndlr]. Qu’est-ce que ça fait d’entrer dans l’histoire de cette manière, comment vit-on un tel moment ?

VA : C’est important. On savait que ça l’était pour le président, pour les dirigeants, les supporters, les bénévoles… Ils nous en parlaient beaucoup, c’était important pour eux, donc on est ravies de leur avoir apporté. Après, il ne faut pas oublier les filles qui ont participé aux 13 précédents pour nous permettre d’aller chercher le quatorzième.

PBF : Personnellement, 3e saison, 3e club différent et 3e titre pour toi. Est-ce qu’il faut une Valériane Ayayi dans son équipe pour espérer remporter le titre ?

VA : Je ne sais pas ! [Rires] Non, je pense que j’ai eu la chance d’avoir de fortes équipes, de pouvoir leur apporter ce que je pouvais leur apporter. Je pense surtout qu’il faut trouver des joueuses qui arrivent à apporter à l’équipe et qui font en sorte que l’équipe tourne bien pour aller gagner.

PBF : Y’a-t-il un titre que tu ferais ressortir du lot ?

VA : Un de plus beau ? Je ne saurais pas dire. Je dirais surtout que cette saison-là a été magnifique, que ça a une vraie signification pour le club et pour nous. J’ai passé une superbe année, avec des filles superbes, donc s’il fallait en choisir un, je choisirais sûrement celui-ci.

PBF : Une superbe année qui se conclut par une sélection dans le cinq majeur de la saison régulière. Cela a-t-il été une fierté pour toi ?

VA : Oui, c’est toujours une fierté ! Après, comme j’ai dit lors de cette soirée, plus que la fierté d’être dans ce cinq majeur, c’est la fierté de remporter un titre qui primerait sur le tout, et ça a finalement été le cas.

PARLONS DE TON AVENIR

Valériane Ayayi face à Pragues, le 13 décembre dernier (Crédit photo : Chloé Berard)

PBF : Tu rejoins Prague la saison prochaine, pourquoi avoir fait ce choix ?

VA : Oui, je l’annonce puisque je crois que ça n’a pas encore été fait ! Je vais avoir une actualité avec Prague. Pourquoi ce choix ? Parce que c’est un club de top niveau européen, mais qui reste encore à la recherche de titres. Il fallait repartir sur un nouveau cycle, donc j’ai décidé de prendre part à ce projet. La coach me désirait, voilà, je pense qu’il était temps de partir vers quelque chose d’autre, sans forcément taper trop, trop haut non plus. J’espère pouvoir m’exprimer comme je le souhaite et pouvoir apporter à ce club. 

PARLONS DE LA WNBA

PBF : Est-ce que tu peux nous expliquer pourquoi tu n’as pas rejoint Las Vegas au final ?

VA : J’étais encore en pleine saison, donc j’avais encore des matchs. Ils ont dû faire leur équipe de 12, ce qui est normal, et de mon côté, j’ai subi une très grosse entorse deux jours avant les demi-finales. Toute seule. C’était donc un très gros signal d’alarme de mon corps, que j’ai écouté, et j’ai donc décidé avec mon agent de ne pas rejoindre les États-Unis cet été.

PARLONS DE L’ÉQUIPE DE FRANCE

Valériane Ayayi lors de France-Italie, le 9 juin 2017 (Crédit photo : Chloé Berard)

PBF : Cet été, il y a le mondial à Tenerife. Comment abordes-tu cette compétition ? 

VA : Je ne sais pas, il faudra d’abord déjà être dans la liste, et après on pourra penser à aborder tout ça ! C’est une compétition importante pour la fédération française, donc les filles qui auront la chance de défendre ces couleurs-là devront faire en sorte de donner le maximum. La fédération prépare beaucoup Paris 2024, mais avant cela, il y a beaucoup d’étapes, et je pense que ça en fait partie. Il faut faire reconnaitre le basket français au niveau mondial, parce que je pense qu’il le mérite !

PBF : Merci beaucoup, on te souhaite plein de réussite pour la suite et une bonne saison avec Prague l’année prochaine !

VA : Merci beaucoup !

Une nouvelle fois, toute l’équipe adresse toutes ses félicitations à Valériane pour ce nouveau titre de Championne de France, et nous lui souhaitons pleins de bonnes choses pour l’avenir.

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