Par Mathieu Seguin | Rédacteur sport
L’aura de Michael Jordan continue de traverser les époques et d’alimenter les débats les plus passionnés. Son retour sous une nouvelle casquette n’a fait qu’accentuer une question récurrente : que vaudrait Sa Majesté dans le jeu actuel ? Les avis se multiplient, et certains n’hésitent pas à chiffrer ses performances hypothétiques.
Dans un échange récent, c’est Tyronn Lue, entraîneur des Clippers et ancien coéquipier de Jordan, qui a lâché une estimation choc. Interrogé sur le nombre de points que MJ pourrait inscrire dans la NBA d’aujourd’hui, il a répondu sans détour : « Oh bordel, 45 ». Pour lui, l’évolution du jeu et surtout l’arbitrage actuel joueraient largement en faveur de l’ancien arrière des Bulls. En rappelant que Jordan avait déjà tourné à plus de 37 points de moyenne en 1986-87, Lue imagine sans peine une inflation naturelle des chiffres grâce à la multiplication des fautes sifflées.
Toujours selon le coach, le contexte offensif d’aujourd’hui rendrait Jordan pratiquement inarrêtable. « Aujourd’hui, tu ne peux toucher personne. C’est une faute. Donc tu prends le meilleur joueur du monde, et tu rajoutes huit points à ses stats. Chaque fois qu’il se fait frôler, c’est deux lancers. Je ne vois pas une saison où il n’irait pas chercher 45 de moyenne », a-t-il poursuivi. Un avis qui rejoint d’autres observateurs comme Jeff Van Gundy, George Karl ou Chris Broussard, convaincus qu’un Jordan moderne franchirait aisément la barre des 40 points par match.
Jordan face à l’ère moderne : un débat sans fin
La comparaison avec les stars actuelles est inévitable. Luka Doncic et Giannis Antetokounmpo, malgré leurs statistiques exceptionnelles, n’ont que rarement franchi la barre symbolique des 30 points de moyenne sur plusieurs saisons. Le parallèle nourrit donc le mythe d’un Jordan intemporel, capable d’exploiter au maximum les espaces et les règles du basket contemporain. Cette perception renforce encore l’idée d’un joueur qui, même hors du temps, resterait dominant.
Mais face à cet éloge unanime, certains nuancent. Daryl Morey, dirigeant influent et grand défenseur de James Harden, n’a pas hésité à provoquer la polémique en affirmant : « C’est factuel que James Harden est un meilleur scoreur que Michael Jordan ». Ses arguments reposent sur l’efficacité statistique de l’arrière barbu, sa capacité à provoquer des fautes, à scorer de loin et à impliquer ses coéquipiers. Harden, triple meilleur marqueur de la ligue, incarne selon lui une évolution naturelle du rôle d’arrière scoreur.
Même Jordan lui-même avait reconnu certaines qualités de son successeur indirect. « Ce que vous voyez avec James Harden, ce n’est pas de l’improvisation. C’est quelque chose qu’il a travaillé et perfectionné jusqu’à ce que les résultats apparaissent », avait-il déclaré. Pour MJ, la constance et le perfectionnement des fondamentaux expliquent la réussite offensive d’Harden, même si cela ne suffit pas à trancher définitivement le duel des générations.
Finalement, ces débats illustrent la fascination intacte que suscite Michael Jordan. Chaque comparaison, chaque hypothèse autour de son jeu dans l’ère moderne, ravive une nostalgie collective mais aussi une admiration pour les nouvelles figures de la NBA. Peut-être qu’au-delà des chiffres et des polémiques, c’est cette capacité à transcender les époques qui constitue le plus grand héritage du numéro 23.